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mardi 9 août 2011

Le retour du politique

Depuis une vingtaine d'année, les politologues et autres esprits sérieux nous expliquaient que nous vivions la fin du politique.
La mondialisation, disaient-ils, réduit de jour en jour la marge de manœuvre des gouvernements, cantonnés désormais dans des décisions secondaires et dérisoires, les grandes orientations étant données par une "gouvernance" mondialisée, aussi obscure que tyrannique. Et de pleurer la fin de l'autorité politique, et de la démocratie dans son sillage.


Le paradoxe actuel est que ce sont les crises économiques mondiales qui remettent en selle l'importance du politique.
En 2008 déjà, la crise des "subprimes" avait mobilisé la fébrilité et l'énergie d'hommes politiques comme Nicolas Sarkozy, réunissant en urgence le G20 et déclenchant les plans de sauvetage des banques par les Etats. Le capitalisme libéral sauvé par l'Etat, ironie de l'histoire !
2011 et deuxième grande crise financière: cette fois-ci, ce ne sont plus les banques, mais les Etats eux-mêmes qui sont menacés de faillite. Cela a commencé par les grands malades européens (Irlande, Grèce, Portugal) pour s'étendre jusqu'au colosse américain aux pieds d'argile.
A nouveau, on voit les hommes politiques aux avants-postes. Obama doit rassurer les marchés en promettant plus de rigueur budgétaire. Trichet, gouverneur de la BCE, appelle Berlusconi, et à travers lui les autres gouvernants européens, à réformer ses lois sociales et à privatiser pour alléger la dette. Le gouvernement français se voit, lui, complimenté par une agence de notation pour la cohérence de ses réformes.


Il en ressort deux choses:
1. En dépit de la mondialisation, continue d'exister une forte identité économique nationale par le biais des politiques économiques et budgétaires. Même en Europe, malgré la forte intégration à une monnaie unique, on n'a pu empêcher le décrochage des pays les plus faibles de la zone euro.
2. Les solutions sont entre les mains des responsables politiques. La BCE a beau venir en aide à l'Espagne et à l'Italie, ce n'est que du replâtrage et tout dépend du courage politique des gouvernements à engager un plan de rigueur et de désendettement. 


La mondialisation n'apparaît plus comme cette machine anonyme qui broie les volontés. C'est bien de la responsabilité individuelle des gouvernants et de la responsabilité collective des peuples que dépend l'issue de la crise.


Trouverons-nous un Churchill capable d'imposer aux peuples les sacrifices nécessaires pour éviter le naufrage ?
"De la sueur et des larmes", voilà à nouveau ce que devrait être la promesse courageuse d'un homme politique décidé à sauver l'Europe et l'Amérique face aux dragons asiatiques.
Comme en 1940, beaucoup préfèrent se complaire dans le fatalisme, la résignation, le défaitisme. En 1940, on croyait sauver la paix, et l'on eut la guerre. Les capitulards d'aujourd'hui croient sauver les "avantages acquis" et ils auront la faillite totale, qui est déjà en route. C'est toujours la même voie de l'autruche qui mène à ces crises brutales de régulations et d'ajustements imposés par la force.


Le retour du politique, c'est le retour de la responsabilité et du courage.
Les lâches sacrifient l'avenir à leurs intérêts électoraux immédiats et au clientélisme des "avantages acquis". Ce sont les démagogues, toujours les plus nombreux.
Plus rares, les courageux imposent les sacrifices pour sauver l'avenir. Ils se font souvent lyncher par les peuples infantiles. C'est la marque des vrais démocrates.
Démocrates ou démagogues, Churchill ou Daladier, c'est à nouveau ce dilemme que nous offre la crise actuelle: le redressement douloureux ou la capitulation.


L'autre paradoxe, plus tragique encore, est que ce sont les marchés et les bourses qui assurent aujourd'hui la régulation des démocraties, à la place des peuples démissionnaires.
Les peuples occidentaux, depuis des décennies,  se sont endormis dans les délices de Capoue d'une croissance ininterrompue de la consommation, par le miracle de l'endettement. Comme dans les antiques démocratie grecque et république romaine, les peuples ont mis au pouvoir les démagogues qui leur susurrent ce qu'ils ont envie d'entendre, à savoir, en substance, qu'on peut gagner plus et vivre mieux en travaillant moins. Les Chinois travaillent pour nous, et rachètent nos dettes...
Jusqu'au jour où les Chinois demandent des comptes !


"Responsabilité" signifie "rendre des comptes", ou encore payer ses dettes, ou encore tenir ses promesses. La crise rappelle les Occidentaux partis en vacances à ces obligations.
Les gouvernements démagogiques peuvent bien rendre des comptes truqués à leurs peuples, mais pas aux marchés et aux créanciers. "Les eaux froides du calcul égoïste" (Marx), à l'échelle internationale, voilà donc le dernier garant de la responsabilité démocratique. Le "crédit" est à la fois le moteur financier du capitalisme et la base de la confiance politique entre le peuple et ses élus.
Quand les parlements élus deviennent des enceintes démagogiques, c'est la bourse et les marchés qui prennent le relais démocratique.


La capitalisme contre les peuples ? N'oublions pas que les peuples se sont beaucoup enrichis grâce au capitalisme. Demandez-donc aux Grecs, aux Portugais, ou même aux Français de comparer leur train de vie avec celui de leurs parents ou grand-parents. Comme de nouveaux enfants gâtés, ils sont ingrats et capricieux, ne supportant pas la moindre contrariété, le moindre rappel à la responsabilité.
La démocratie contre la démagogie, voilà ce qu'impose aux enfants gâtés et décadents les crises du capitalisme mondial.
Merci la crise !

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