La France officielle a été admirable devant le crime antisémite de Toulouse, arrière-pensées ou pas: minute de silence, campagne électorale suspendue, condamnation unanime, émotion manifeste. La France d'en haut a pris la mesure de la gravité de l'événement.
Le contraste est flagrant avec le silence assourdissant de la France d'en bas: dans les cantines, le métro, les machines à café, la vie continue comme si de rien n'était. On plaisante, on bavarde sur des broutilles, on commente le beau temps. Les plus audacieux ironisent sur le « mauvais coup » que Sarkozy a trouvé pour se faire réélire…
Pas un mot de compassion, mais le silence et l'esquive. A qui veut évoquer le drame on réplique froidement: "C'est un fou, un accident. Il y en a toujours eu, pas besoin d'en faire un drame." Sous-entendu : ces Juifs, toujours à faire leur intéressant.
La bruyante couverture officielle couvre mal ce silence du pays profond qui ne dit rien, mais n'en pense pas moins: "Qu'ils nous foutent la paix, ces Juifs et ces Arabes, comme si on n'en avait pas assez avec nos problèmes. Et puis, on ne va pas se laisser gâcher le printemps !"
Une semaine après, France d'en haut et France d'en bas se réconcilient: "il faut tourner la page !", entend-on de partout. La campagne électorale reprend, plus ennuyeuse que jamais, plus que jamais coupée du malaise profond refoulé sous le tapis, tel un honteux secret de famille.
Le malaise est tel qu'on ne juge même plus utile de manifester. Pour dire "plus jamais ça" ? Plus personne n'y croit, tant la violence s'est banalisée dans l'indifférence et la dénégation.
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